Ce roman, paru en 2005, nous raconte l'histoire d'une émission de télévision, appelée "Concentration",
où l'on simule un camp de concentration, avec les prisonniers, les kapos et tout le reste.
À vrai dire il ne s'agit pas d'une simulation, parce qu'on arrive à torturer et même
à tuer les prisonniers, comme dans un vrai camp nazi, mais avec plein de cameras, placées partout,
pour que tout le monde puisse voir se qui se passe, en direct.
L'ironie de ce bouquin est évidente, il suffit de penser à toutes les émissions pareilles, aux
Grands Frères, îles des célèbres, etc., qui ont rempli et remplissent encore plein de
chaînes de télévision, partout en Europe. Or, c'est vrai qu'on n'arrive pas à tuer le participants,
dans ces émissions, mais quand on lit d'un homme blessé, d'un autre qui fuit, d'autres qui tombent malades,
bon, nous y sommes presque...
Dans le roman, les organisateurs capturent des personnes dans la rue et puis les emmenent dans le camp,
où ils sont filmés 24 heures sur 24. Les protagonistes dont le roman nous parle sont deux jeunes femmes,
le kapo Zdena - stupide, moche et peu cultivée, elle a accepté de travailler pour le camp simplement
pour gagner de l'argent - et la prisonnière CKZ 114, dont le vrai nom est Pannonique - intelligente,
douce et belle comme un beau papillon.
Zdena découvre d'aimer Pannonique et un rapport très compliqués se développe entre les deux
femmes, entre le bourreau et la victime.
Dans la première partie du roman, j'ai retrouvé plusieurs thèmes présents dans d'autres
oeuvres du même auteur, comme la liason - dangereuse, voir sado-masochiste - entre
deux femmes, l'idée d'être Dieu, le pessimisme extrême sur la nature humaine uni à
l'admiration pour les phénomènes naturels. Même si je trouvais intéressant le bouquin,
j'avoue que je commençait donc à m'ennuyer un peu, pendant mes voyages en métro, malgré
l'originalité du décor.
Mais quand je suis arrivé à une certaine page, le roman a décollé, littéralement, il s'est
envolé et moi avec lui. À partir de cet instant, là où l'on parle de l'audience des
émissions avec une ironie admirable, j'ai aimé ce roman jusqu'à la fin, où l'on trove même
un peu d'optimisme, ce qui est presque incroyable pour cet auteur.
Un roman à lire, donc, surtout par les gents qui travaillent dans les médias.
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Alcuni brani:
Les spectateurs attendaient avec impatience la séquence des kapos: il savaient qu'ils pourraient
les haïr et que ceux-ci l'auraient bien cherché, qu'ils alllaient même fournir à leur
exécration un surcroït d'arguments.
Ils ne furent pas déçus. Dans l'abject médiocre, les déclarations des kapos passèrent leurs
espérances.
Dès leur arrivée au camp, les prisonniers avaient été dépouillés de leurs vêtements et
avaient reçu une tenue réglementaire à leur taille - pijama pour les hommes, blouse pour les
femmes. Un matricule qui leur était tatoué dans la peau devenait l'unique nom autorisé.
CKZ 114 - ainsi s'appelait Pannonique - était désormais l'égérie des spectateurs. Les journaux
consacraient des articles à cette jeune fille admirable de beauté et de classe, dont personne
ne connaissait la voix. On vantait la noble intelligence de son expression. Sa photo s'étalait
en couverture de nombre de revues. Le noir et blanc, la couleur, tout lui allait.
Le kapo Zdena continuait à ne plus glisser de chocolat dans la poche de Pannonique.
L'audience de « Concentration » continuait de croître.
Si la jeune fille avait su que son courage avait eu cette conséquence, cela eût porté à
son comble un désespoir déjà intolérable.
Les journalistes remarquèrent la triste mine de l'égérie. Beaucoup de médias évoquèrent le
probable châtiment qu'avait dû lui avoir sa déclaration : « Nous devrions
d'autant plus suivre la consigne de Pannonique qu'elle a payé cher son héroïsme. »
L'audience de l'émission s'en accrut.
Un éditorial releva ce phénomène : « Vous êtes tous ignobles. Plus vous êtes
indignés, plus vous regardez. » Ce paradoxe infect fut repris et martelé par l'ensemble
des médias.
L'audience de l'émission atteignit des cimes.
Un journaliste du soir reprit l'éditorial du matin : « Plus nous parlons de "Concentration",
plus nous en soulignons l'atrocité, plus ça marche. La solution, c'est le silence. »
Le médias assurèrent un écho fabuleux à cette volonté de mutisme. TAISONS-NOUS ! titraient les
magazines. Le quotidien au plus fort tirage remplit sa une d'un seul mot : SILENCE ! Les radios
répétèrent à qui voulait l'entendre qu'elles ne diraient rien, alors là rien, sur ce sujet.
L'audience de l'émission creva le plafond.
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